Lorsque j’ai gagné mon inscription à l’Ultra Boucle de la Sarra lors de la 180, et j’en profite pour remercier encore le Lyon Ultra Run, je me suis posé la question de savoir si j’allais vraiment y participer? Course de hamster née de l’imagination débordante d’Arthur Baldur et de ses compères, la 3 ème édition de cette épreuve ne semblait pas vraiment faite pour moi. Course urbaine, à Lyon, consistant à faire un maximum de tours d’un circuit de 2 km, et cela durant 6h00, n’était à priori pas vraiment ce qui m’excite le plus. Mais quelques mois plus tard, cette course qui se place 15 jours avant la Maxi Race, épreuve qui va conclure 5 mois de préparation générale à l’UTMB, se trouve être l’occasion d’une grosse sortie longue et surtout le plaisir de revoir tous les amis de la 180.
Me voilà donc avec Théo, venu m’accompagner durant quelques tours, sur l’esplanade de la piste de la Sarra à 16h00. Nous ne sommes pas ni l’un ni l’autre en terres inconnues( copyright Frédéric Lopez) car nous avons déjà fait tous les 2 le Lyon Urban Trail by night. Nous avons donc déjà eu l’occasion de dévaler la fameuse piste de la Sarra et de grimper quelques escaliers de la colline de Fourvière. Après avoir salué quelques connaissances, je récupère mon dossard, le 62, soit un mixte de 69 et de 42, ce qui finalement est symboliquement très représentatif d’un Stéphanois venu courir à Lyon. 16h45, on descend la piste pour rejoindre le départ qui se fera en montée, ceci afin d’éviter les bousculades. Nous sommes 300 participants, avec les relayeurs, sous un beau soleil, plusieurs coureurs sont venus déguisés, l’ambiance est très détendue. On tape la causette avec Théo assis sur la murette, je suis ravi de partager ce moment de sport avec mon fils, rien que pour cela, ça valait le coup de venir.
17h00, le départ est donné! Dré dans l’pentu pendant 150m avec 40 m de D+! Tout de suite ça calme. On bascule et c’est parti pour la 1ère descente de la Sarra: de l’herbe avec un sentier en terre et une pente moyenne de 20% à 25% sur la partie haute. Au bas de la piste, on attaque le chemin de Montauban, une voie sinueuse qui serpente à mi pente le long du flanc nord de la colline de Fourvière. Le chemin est globalement plat si ce n’est une petite côte qui va s’avérer bien pénible au fil des tours. Ensuite un secteur pavé sur cinquante mètres avant d’emprunter sur la droite les escaliers de la montée Nicolas de Lange. Un escalier interminable, qui conduit au pied de la tour métallique qui domine la colline de Fourvière. Les marches ne sont pas très hautes mais elles sont nombreuses, 563 marches à gravir par tour. Arrivé en haut on débouche sur une petite place, ensuite un chemin plus étroit et boisé. Puis on arrive sur l’imposante passerelle des 4 vents qui offre un chouette panorama de Lyon. Le circuit se poursuit ensuite en alternant passages arborés ou dégagés pour revenir au point de départ à la Sarra. Voilà vous connaissez le parcours.
Tour 1/16’38 »: Avec Théo on fait ce 1er tour au jugé afin de voir quelle va être le rythme à adopter. Théo est très présent et me conseille, notamment sur l’allure dans l’ascension des marches et pour garder une bonne respiration. Je stoppe quelques secondes au ravito des « solos » ou à ma grande surprise il y’a à boire et à manger en quantité et en qualité. Je passe sur le tapis rouge ou se presse une foule bruyante composée des relayeurs et de spectateurs qui nous encouragent. C’est particulier et très sympathique cette ambiance de fête. L’impression d’avoir passé la ligne d’arrivée et d’être félicité alors que la course vient juste de démarrer. Je retrouve Théo en haut de la descente de la Sarra et c’est parti pour un 2ème tour.
Tour2/15’56 »: J’expérimente la descente en style « canard » qui me semble plus efficace et surtout moins traumatisante pour mes cuisses. Je salue Anthony posté dans le chemin de Montauban, Bernard un peu plus loin et Gaby qui est lui en haut des marches. Un bref stop au ravito: eau plate ou eau gazeuse avec sandwich jambon ou coca/banane, voilà ce qui sera mon menu selon les tours.
Tour3/16’02 »: Je me rends compte que l’objectif de 20 tours ne va pas être facile, même si pour l’instant je suis en dessous de la moyenne (18′ au tour), d’autant plus que Théo ne sera plus là pour m’accompagner d’ici 2 tours.
Tour 4/15’58 »: Nicola et Athur sont au ravito et me branche en me proposant un maillot de Lyon et en clamant leur amour pour l’OL. Comme quoi, personne n’est parfait. Loin de me démoraliser, cela me galvanise et je repars de plus belle. La sono envoie du lourd et je passe sur la ligne en esquissant quelques pas de danse. 15’58 »
Tour 5/18’02 »: C’est le dernier tour avec Théo qui me quitte en haut des marches de la montée de Lange. Bises, je te donne des nouvelles et toi tu m’informe pour le match des Verts. Après le stop au ravito, je laisse mon sac à dos pour être plus léger et j’abandonne mon bidon avec mon mélange eau+Hydraminov. Le stop ravito toutes les 20′ est largement suffisant.
Tour 6/17’47 »: Je ralentis l’allure car je vais avoir du mal à tenir ce rythme durant 20 tours. Je commence à sentir des douleurs dans les cuisses et la montée des marches est de plus en plus lente.
Tour 7/19’18 »:1/3 de la course, voir un peu plus au vu de mon objectif de 20 tours. 1h54 de course, j’ai un poil d’avance mais d’envisager qu’il me faut descendre cette foutue piste et surtout de gravir les 563 marches encore 13 fois me semble totalement déraisonnable. Je fais quand même un stop sous la tente pour récupérer mon téléphone et m’assoir quelques instants.
Tour8/18’56 »: Anthony nous nargue avec sa bière à la main, mais je l’ignore et continue ma ronde infernale. Plus loin je double Patricia qui comme elle l’avait annoncée est en mode : « tranquilou pompomlapinou « . J’avais dit que pour moi aussi ce serait tranquille, mais ça ne l’est pas du tout, je commence à avoir vraiment mal aux jambes.
Tour 9/ 20’56 »: Pffff!!! Je commence à en avoir ras le bol de toujours passer aux mêmes endroits. Je repense à ces coureurs de 24h00 qui souvent sont sur des circuits encore plus courts et cela durant 24heures… Ce n’est plus du mental qu’il faut dans ces conditions c’est carrément de pouvoir débrancher le cerveau.
Tour 10/20’29 »: Mi course, tout au moins mi objectif. 2h50, 10 mn de marge, mais je vois bien que je vais de moins en moins vite.
Au ravito, les sympathiques bénévoles me demandent si ça va? Je réponds que oui, mais j’envisage difficilement de refaire ce qui vient d’être fait.
Tour 11/26’46 »: Après une pause sous la tente, je branche la musique. Désormais je suis dans ma bulle, je suis une ligne virtuelle du parcours. Curieusement plutôt que de profiter de l’environnement qui est très agréable dans la lumière du soleil couchant, j’ai le nez sur la route. Habitude de traileur qui regarde toujours ou il met les pieds.
Tour 12/19’55 »: Les bénévoles nous encouragent à chaque passage, que ce soit au ravito ou aux endroits stratégiques du parcours. Toutes les 20′ vous retrouvez un visage connu et vous avez le plaisir de partager avec quelqu’un votre effort. Le sentiment qui me traverse l’esprit c’est que pour la 1ère fois dans une course je partage plus avec les bénévoles et les spectateurs qu’avec les autres coureurs.
Tour 13/22’29 »: En bas de la Sarra, je me met dans les pas d’un coureur, mais dès les 1ères marches je suis obligé de le doubler. Dans cette épreuve, chacun est vraiment à son propre rythme, il me semble très difficile de faire cette épreuve en binôme ou à plusieurs.
La zone d’arrivée est envahie par des fumigènes, avec la musique et le tapis rouge, on a le sentiment de rentrer sur une scène.
Tour 14/22’29 »: les 2/3 de l’objectif. 4h32 de course. Ca y’est je n’ai plus de marge, l’affaire se complique. Allez encore un tour et je récupère la frontale, j’aurais fait les 3/4 c’est déjà pas mal. Il y a un côté mécanique et routine qui s’est mis en place: la descente, la voie sinueuse avec sa montée que je fais toujours en trottinant, mais de plus en plus lentement, la montée des marches avec la technique: « 1 marche avec la jambe droite puis 2 avec la gauche et un grand souffle sur chaque esplanade », le salut de Gaby, la passerelle qui vibre, la longue ligne droite avec les mômes qui nous interpellent, la fille à droite qui tient son ravito pour son équipe, le demi tour, je marche jusqu’au ravito, eau gazeuse, jambon, coca, banane, je repars, le tapis rouge, la foule, la musique (que je n’entends quasiment plus avec la mienne) et de nouveau la descente. Et au fait 4h30 que ça dure…
Tour 15/24’36 »: Comme le tour 14… Je retrouve les mêmes coureurs au ravito, on doit tourner plus ou moins au même rythme. Par contre aucune idée pour savoir dans quel tour je me trouve? Sont ils devant ou derrière moi? Mystère! Je découvre en passant la ligne qu’il y a le classement affiché, je suis 66 ème… Fort bien… On était une centaine au départ, donc c’est pas mal. Allez on continue! Au moins il n’y a pas besoin de réfléchir ou de se poser la question de savoir comment sera la suite du parcours…
Tour 16/21’14 »: Désormais, il fait nuit et même si le circuit est bien éclairé, j’apprécie la lumière de la frontale. Cela réduit encore un peu plus l’environnement, mais cela ne me gène pas vraiment même si je relève un peu le nez pour apprécier les lumières de la ville ou la tour Effeil éclairée. J’ai le sentiment d’avoir toujours connu les personnes du ravito qui me sourient et me servent toujours aussi gentiment à chaque tour. C’est vraiment un des trucs agréables de ce type de course, ce réconfort toutes les 20 minutes.
Tour 17/22’08 »: D’après mes calculs, il va me manquer de quoi faire un tour, mais bon je suis quand même très content d’être toujours en train de tourner. Ah! Merci! Je réponds à un bénévole qui comme à chaque tour m’encourage et me félicite pour cet exploit incroyable! Vraiment trop sympa! Un coureur me double pour la 4 eme ou 5 ème fois, je me demande si c’est le 1er? C’est drôle, ça aussi, de savoir que le vainqueur est toujours en train de courir. D’habitude alors qu’il me reste environ 45 mn de course, le vainquer est douché, changé et souvent rentré chez lui avec sa coupe sous le bras.
Tour 18/21’27 »: Il me semble qu’il y a un plus grand nombre de coureurs!!?? Je me motive dans les escaliers en me disant que c’est l’avant dernière fois que je les grimpe. J’ai vraiment mal aux cuisses, mais pas de crampes et ce n’est pas dans la montée que c’est le plus douloureux, mais dans la descente ou sur la partie plane avant l’arrivée.
Tour 19: 5h38mn de course, il reste 22mn avant la sirène des 6h00. Je profite, et me permet même le luxe de marcher dans le chemin de Montauban en faisant un petit salut à tous les bénévoles qui nous félicitent. Je rejoins dans les marches 2 coureurs qui se lamentent sur le fait que leurs gamins vont les réveiller à l’aube demain. Je leur fait alors remarquer l’avantage d’être un vieux V2 avec des enfants qui se lèvent plus tard que leurs parents, quand ils sont encore à la maison. Alors que la sono annonce les 6h00 dans 1 mn un des 2 gars propose de m’emmener en sprintant jusqu’à la ligne pour passer avant le gong et enclencher un dernier tour. Très peu d’hésitation car j’ai un peu peur de laisser mes quadris sur le carreau et je n’oublie pas que j’ai la Maxi Race dans 15 jours, donc je décline l’invitation.
Arrivée: 6H01’35 ». C’est avec la sono à fond, les fumigènes, les lumières des projecteurs et entre 2 haies de coureurs et spectateurs que je franchis la ligne. Quelle arrivée triomphale! Quel plaisir de recevoir les félicitations des vainqueurs alors que le premier est peut être encore en train de courir pour terminer son tour. Rien que pour ça les courses en circuits horaires sont un must. Je profite de ces instants, de cette ambiance chaleureuse sur l’esplanade de la Sarra. Je savoure le plaisir d’en avoir terminé et de recevoir cette gratification de la part de cette foule dans laquelle se mêlent organisateurs, coureurs et spectateurs. Je rejoins la tente ou après m’être changé, je profite du buffet en compagnie d’un coureur qui a terminé 4 ème. Sympathique partage, habituellement quand j’arrive au bout d’une course le 4 ème est déjà rentré chez lui …
C’est avec regret que je retourne à ma voiture, alors que débute la remise des prix. Il règne vraiment une ambiance conviviale et j’aurais aimé allé saluer Arthur et sa bande et les remercier pour la qualité de l’organisation, ainsi que pour le plaisir que j’ai pris à participer à cette Ultra Boucle de la Sarra, 3 ème du nom. Mais je suis crevé, des frissons de fatigue me parcourent le corps et j’ai 1h00 de route pour rentrer en ville (private joke). Pour rester dans la notion de plaisir, ma voiture est garée à 20m de là et je la rejoins sans problème malgré mes cuisses douloureuses. Je rentre à la maison sans soucis avec plein de belles images dans la tête.
Aujourd’hui après avoir bien récupéré de l’Ultra Boucle de la Sarra, je vais me faire 1 semaine ultra light (vélo et footing tranquille) avant les 85 bornes de la Maxi Race. Ensuite, dès le 1er Juin, je vais rentrer en mode spécifique. Terminées les courses (hormis quelques petites épreuves pour le festif et pour partager des moments avec les amis), toute la préparation (influx nerveux, condition physique ) sera faite pour être au top la dernière semaine d’Aout.
Ultra salutations.
« les choses avec le sérieux d’un enfant qui joue » (JL.Aubert)