On ne le répètera jamais assez, mais ce qu’il y a de bien avec la course à pied, c’est que sur une même ligne de départ, on peut très bien trouver le champion du monde en titre de marathon à côté d’un sportif lambda pour qui c’est la première compétition de sa vie. C’est ce qui fait toute la beauté et le charme de cette discipline. Mais le revers de la médaille, si l’on peut dire, c’est que sur cette même ligne de départ, il y a autant de coureurs que de préparations, d’entraînements, de fatigues, de joies, de peines, de malheurs et de souffrances différentes… Bref je me suis souvent
demandé, après avoir couru, si c’est bien le plus fort qui l’avait emporté finalement. Intrinsèquement sans doute pas! C’est juste le plus frais, le plus entraîné ou simplement le plus en forme du moment. Je ne parle ici même pas de dopage, ce n’est pas le sujet !
Mais bon, j’ai toujours une petite pensée vers tous ceux qui, pour des tas de raisons possibles, n’ont pas pu arriver au meilleur de leur potentiel au rendez-vous et qui tenaient pourtant absolument à participer. Pour celui, qui, par exemple, n’a pas fermé l’oeil de la nuit depuis une semaine par ce que ses voisins font un boucan du diable et qui va réussir malgré tout à terminer pas si loin que ça. Et si jamais il avait pu dormir tout son saoul? Pour celui aussi qui n’a pas eu une minute à lui pour s’entraîner depuis un mois car il a changé de boulot et qui pourtant arrive à finir dans
le premier tiers du paquet. Et si jamais il avait seulement pu aller courir deux fois par semaine, qu’est-ce qu’il aurait fait ? Ce sont toutes ces considérations qui me font souvent réfléchir aux performances des uns et des autres, subitement fort relatives…
Il faut toujours tout ramener à sa juste valeur. Bienheureux finalement celui qui a tout le temps qu’il veut pour s’entraîner, tout le temps qu’il souhaite pour pouvoir récupérer aussi… Bien sûr je ne vous parle pas ici des athlètes de haut-niveau. Ce n’est pas non plus le sujet. Ceux-là vivent dans un autre monde. Ou tout tourne autour de la course à pied…
Je parle de vous et moi. De tous ceux que l’on croise sur la plupart des courses du week-end et qui font le gros du peloton. Qui font la course à pied tout simplement… Alors il est de bonne guerre de toujours trouver une excuse. N’avez-vous jamais entendu les incontournables: « Je n’étais pas en forme aujourd’hui car je me suis blessé il y a quinze jours et je reprends juste » ou « J’ai fait la bringue hier et j’ai failli ne pas venir », ou encore « j’ai un début de tendinite, c’était très dur pour moi », ou enfin « je prépare le marathon de T…. et je ne suis pas encore au top, j’accumule des kilomètres. » Cela fait partie intégrante du coureur quel qu’il soit. Si l’on écoute tout le monde, personne ou presque, n’est vraiment bien au moment où il court.
C’est incroyable. Mais personne non plus n’est obligé de prendre un dossard sur telle ou telle épreuve. D’autant plus que quand on est malade, bien souvent, on préfère rester couché… Et bien pas le coureur, il faut croire. Il préfèrera se gaver de médicaments pour être présent le dimanche matin… Cela n’est pas sans rappeler d’ailleurs quelques cyclistes qui ont terminé des étapes avec des fractures sur le Tour de France. A l’épaule, au poignet, les exemples sont légions. Pour les spectateurs, ils passent pour des surhommes, mais quand on sait ce qu’ils doivent avaler pour continuer à rouler, ça fait mal au ventre tout de même. Mais ça aussi, c’est une autre histoire… Beaucoup d’entre nous n’ont pas besoin d’en arriver là pour demander un arrêt maladie. Un nez qui coule parfois. Qui me jettera la première pierre ?
Mais bon, pour conclure, j’attends de voir sur une course quelqu’un qui me dise qu’il n’est pas en forme par ce qu’il n’a pas dormi depuis deux semaines, qui se remet en plus d’une fracture du tibia de début de saison et qui a fait la bringue la veille au soir jusqu’au petit matin et qui, bien sûr, se paye le luxe de gagner avec un chrono de folie… Mais si c’est possible !