Résumés des deux épisodes précédents : Steeve est tombé sous le charme de sa nouvelle collègue de bureau Priscilla – ça se voit non ? sinon relisez plus attentivement, je ne peux pas être plus explicite. Celle-ci n’en a cure jusqu’à l’apparition soudaine et inattendue de son ex, Brad.
« – Tu pourrais me servir de lièvre, j’aimerais battre mon record de l’an passé ? » lui demanda de but en blanc Priscilla.
Brad n’avait pas perdu une miette de ces paroles. D’un naturel bronzé, quoique dans son cas le terme naturel fut franchement peu adéquat, son visage ne sembla pas trahir d’émotion particulière. Mais un observateur plus averti du caractère quelque peu ombrageux du bellâtre n’eut sans doute pas manqué d’observer l’apparition soudaine d’une fine ligne rouge à la racine des cheveux, signe chez lui, non pas d’une intense réflexion dont il était bien incapable mais d’une manifestation externe d’un accès contenu de très mauvaise humeur.
Car, jusqu’à présent, c’était lui, le seul, l’unique Lapinou à sa PriPri (note du traducteur : le lièvre de Priscilla). Proposer à ce … ce … ce …, le terme idoine ne lui venait pas – avec un peu plus de culture intellectuelle, car côté physique il était bien doté, il eut pu employer freluquet ou encore paltoquet par exemple – donc proposer à ce … de Steeve Profit, de prendre sa place auprès de sa PriPri à lui, de partager avec elle ces kilomètres de bitume, de lui ouvrir la route tendrement, comme si on lui déroulait amoureusement un tapis de fleur, de la précéder pour effacer tous les menus obstacles qui pourraient se dresser devant elle – papier gras, bouteilles vides, peaux de bananes et autres tubes de gel – de l’encourager tout au long du chemin « vazy vazy vazy, t’es la meilleure, tu vas gagner, vazy, vazy, vazy, vazy ! », de la porter vers la plus haute marche du podium, ce piédestal sur lequel, lui, Brad, la vénérait depuis des années. Non vraiment, demander tout cela à ce … de Steeve Profit, c’était vraiment trop … enfin trop … si vous voyez ce que Brad aurait pu dire avec quelques neurones en plus.
Steeve, sans aucun doute, troublé par cette soudaine, mais bien agréable par ailleurs, ne l’ignorons pas, promiscuité, n’eut pas la présence d’esprit de s’enquérir des bases chronométriques sur lesquelles pensait courir l’extraordinaire, la sublime, la divine Priscilla. Toujours sur son petit nuage, il fit, comme de bien entendu et comme vous l’avez aisément deviné à ce stade du récit, une réponse positive marqué d’un excès un tantinet superflu d’enthousiasme : « Sans problème ! A nous deux on va le pulvériser ce record ! ». Aussi soudainement qu’elle s’était approchée de lui et sans un mot de plus, Priscilla retourna s’asseoir non sans avoir toisé Brad au passage. Le dit Brad qui tourna aussi sec les talons et repartit d’où il était venu, muet mais certainement sans en penser moins, avec les mots dont il avait la maîtrise.
Steeve, dont on sait maintenant qu’il lui faut toujours un peu de temps pour redescendre sur terre après de telles stimulations, mit, comme d’habitude quelques minutes à retrouver ses vrais esprits et se replongea dans le travail, de sombres affaires de contentieux entre entreprises à démêler, si possible, au profit, des clients du cabinet. Ce n’est qu’en se rendant à la cantine qu’il se mit réellement à réfléchir aux conséquences de propos prononcés lors d’un état que le terme second serait bien trop faible pour caractériser.
FIN DE L’EPISODE 3
Dans l’Episode 4, nous découvrirons, sans doute dans le détail et pour ne plus y revenir par la suite, car je ne vais jamais réussir à tenir 15 chapitres en prétendant vous les énoncer à chaque fois au suivant, ces conséquences et nous retrouverons aussi la mère de Steeve que nous avions délaissée. Rendez-vous vendredi.