– Steeve chou, il y a quelque chose qui te tracasse !
– Non, M’man, j’t’assure, tout va bien.
Et pourtant, le Steeve chou à sa maman était bien tracassé. Non pas, parce qu’à 27 ans, il habitait encore avec sa mère, ce que d’aucuns auraient pu juger saugrenu ou pire malvenu, car cette situation bien loin de l’offusquer, lui convenait tout à fait, tout au moins pour le moment. Non, ce qui tracassait Steeve, c’étaient les propos qu’il avait tenus plus tôt dans la journée à Priscilla.
Ah Priscilla ! Pour résumer et éviter une description trop longue pour une e-saga, disons simplement que toute l’étendue du vocabulaire de Steeve ne saurait en décrire la beauté. Priscilla, qui plus est et c’était là un point fort intéressant, toute fraîche célibataire, après sa rupture bruyante avec Brad. Priscilla, que le hasard de réaménagements de bureaux venait de placer juste en face de lui, pour une fois que l’open space avait un avantage. La douce Priscilla, dont il ne se lassait pas d’admirer … le sommet du crâne, seule partie de son anatomie qu’il pouvait apercevoir derrière la triple haie de coupes qu’elle avait érigée entre leurs deux bureaux, en prenant ses nouveaux quartiers.
Car, en plus, d’être une remarquable juriste, Priscilla était également une sportive plus qu’accomplie, une passionnée de course à pied, marathonienne émérite et chasseuse de podiums. Son seul défaut, mais que ne pas pardonner à une telle splendeur, était sans aucun doute cette propension à exposer au vu et au su de tous ses collègues de bureaux, les trophées, qu’elle glanait chaque semaine. Steeve, dans un souci évident de visibilité, aurait sans doute préféré qu’elle courût parfois un peu moins vite.
A 11h ce matin-là, une trouée se fit, soudain, dans ce mur épais de ferraille. Que la lumière soit ! Priscilla souhaitait visiblement procéder à un léger remaniement de l’arrangement métallique, faire profiter le Marathon de St Père les Tronches de la lumière du jour et relèguer les 12,45 km d’Eustache St Berre au troisième front. Saisi d’une impulsion subite, dont il ne cessa de resasser la piètre pertinence durant les heures qui suivirent, Steeve profita de l’occasion pour lui adresser enfin la parole : « Moi aussi, je cours ! »
FIN DE L’EPISODE 1
Dans l’épisode 2 (vendredi), nous découvrirons que Steeve, sur sa lancée, en a dit bien plus que ces 4 mots, ce qui est, peut-être, mais ce n’est pas certain d’ailleurs, la cause de son tracas.
Vous retrouverez cette saga tout l’été chaque mardi et chaque vendredi en fin d’après-midi. Soyez fidèles au rendez-vous.