Retour d’Olivier : traileur en VFF
Il y a sans doute pas mal de fan du minimalisme sur Wanarun, et mon expérience n’est certainement pas la plus époustouflante, mais je partage ma première course perso en VFF, comme un exemple de ce que cela peut être pour le coureur lambda.
Depuis un an j’ai découvert les VFF et depuis 6 mois je ne cours plus qu’avec cela.
Déraisonnable? peut être, mais après 6 mois, aucune douleur articulaire ni quoi que ce soit, mis à part les mollets qui travaillent, mais ça, ça ne peut pas faire de mal.
Juillet et Septembre j’ai couru deux trails, maratrail de Faverges et 20km au Galibier. Très justement sur le facebook de Wanarun on m’avait déconseillé de les courir en VFF et c’est vrai la montagne, ça reste la montagne… donc j’ai bien fait d’être raisonnable et de m’aligner au départ avec mes Péregrinne de Saucony.
N’empêche que se retrouver dans les lieux aussi magique et ne pas pouvoir connaitre toute la liberté à laquelle on a goûté quand on est passé au minimalisme c’est très frustrant.
Donc quand j’ai vu le trail de la côte d’opale se profiler je me suis dit que c’était là l’opportunité de tester en live les VFF, sur du trail, sur du long, sur un terrain de jeu que je connaissait un peu et qui me semblait accessible… même si je n’avais que 2 semaines de repos après le Galibier (toujours dans le déraisonnable).
Petite frayeur la veille au soir en lisant le pitch de la course, avec des mots comme Pierre, rochers, et surtout Galets!!
Depuis que je cours en Five finger j’ai deux frayeurs: les Glands du bois de Vincennes et les pierres ayant une taille inférieur
5 cm, donc les Galets… ceux qui se sont baladés pieds nus sur la plage de Nice comprendront ce que ça peut être.
Mais bon je voulais expérimenter à tout prix, je sentais que c’était vraiment l’opportunité de m’éclater (oui c’est le terme en VFF, je me sens vraiment comme un gosse qui s’amuse, alors il était hors de question que je laisse tomber l’idée d’aller jouer dans les rochers au bord de la mer!).
Donc à 9H00 c’est parti pour 62 km de Dune, Rochers, Chemins…
Conditions climatiques idéales en tous cas selon mes goûts, frais et nuageux.
Départ sur la plage: easy, je suis dans mon élément, sans doute beaucoup plus facile que tous les coureurs en grosses chaussures de trail qui s’enfoncent bien. Si le reste est à l’avenant ça devrait passer tout seul (si tant est que 62 km peuvent passer tout seul…).
Au sortir de la plage premiers bouchons pour monter dans les dunes, puis premières pierre, malgré cela les jambes sont encore bien fraiches, les mollets piaffent d’en découdre. Je m’amuse comme un fou à zigzaguer entre les pierres.
Au bout de 10 km de chemin premiers petits signes de douleur sur l’avant du pied. Un ou deux faux pas sur des cailloux sur lesquels j’atterri direct avec l’os cuboid. En plus je commence à me rendre compte que dans une certaine mesure ce que je gagne sur les autres en terme de légèreté et de souplesse, je le perds en brûlant plus d’énergie pour faire mon chemin (plutôt que d’aller tout droit).
Heureusement quand je commence à flipper arrive juste à propos un passage en forêt et là le doux tapis d’aiguilles de pin me sauve et me rappel pourquoi je suis définitivement passé au minimalisme…
Cette portion me requinque avant d’arriver au premier ravito 13km et d’attaquer une nouvelle portion de plage.
Voici enfin les galets tant redoutés! Je respire, il sont tous petits et les pieds s’enfoncent: même pas mal! La je suis à égalité avec les porteurs de baskets.
Un petit raidillon, un peu de bitume et nouvelle portion de plage. Celle-ci s’annonce bien: traversée d’un ruisseau de 20 cm de profondeur, certains enlèvent leur chaussures, pour moi à quoi bon? je porte juste une couche de caoutchouc retenu par un peu de mesh, alors je patauge gaiement.
Sur la plage le choix: galets et sable mou ou bien sable ferme mais pieds dans l’eau – comme j’ai toujours un petit fond de douleur sur l’avant du pied, galoper dans l’eau fraîche me fait du bien.
La plage finit pour cette première boucle, on rentre dans les terres en passant les derniers murs de dunes. Alors là attention quand Brel parle du plat pays, faut pas confondre: c’est la Belgique, pas le nord! Dans le Pas de Calais, ça monte et ça descend tout le temps… c’est pas parce que y a pas de monté de 500 D+ d’un seul coup que c’est facile. La parcours est tout en relances. Les dunes, ça use; les pieds s’enfoncent et les km commencent à s’accumuler.
Passer les barrières de dunes qui séparent la plage de l’intérieur des terres on rentre dans le domaine des chemins de terre et de pierre. Là ça commence à peser sur les pieds, les mollets. 25 km je commence à sentir que je suis »presque pieds nus ». Heureusement quelques portions de bitumes viennent me permettre de reposer mes pieds. En VFF un léger faux-plat montant sur bitume est un vrai bonheur, le pied se pose comme une fleur sur l’angle de la route (en tous cas avec ma foulée).
Seulement ces portions sont courtes (logique c’est un trail un vrai).
La seule averse de la journée arrive, à peine 5 min le temps de se rafraîchir! qui à dit qu’il pleuvait tout le temps dans le nord.
30 km! le mur (en tous cas pour moi il est là, c’est la première fois que je pars pour dépasser la barre du marathon – déraisonnable?), la douleur n’est pas dans les jambes, le souffle ça va, la tête ça passe, par contre je commence vraiment à avoir mal aux pieds. Molllets et pieds, je sens que je ne suis plus décontracté que tout devient moins fluide…
Petit texto à ma femme qui n’est pas loin sur le parcours (km 40) pour lui demander de sortir du coffre une vielle paire de Pegasus qui traîne là.
Avant cela arrivée au km 36, arrivée de la première boucle, fin du parcours pour ceux qui s’étaient engagés sur la course de 36, ravito (suis-je dans les derniers? en tous cas je trouve ça un peu léger: Hydrix, Coca, Oranges et Pruneaux) du coup autre petit SMS à ma femme pour voir si elle peu pas me trouver une spécialité locale qui me tiendras mieux au corps.
10 min de pause et c’est reparti… pour 3km de bonheur: un rayon de soleil, 3km de plage comme le nord nous en réserve: du sable bien tassé par la marée et la vue sur les kite surfs qui s’amusent.
Arrivé au KM 40 et à mon ravitaillement personnalisé: un fricadelle! tout juste sortie de la baraque à frite du bord de mer! un délice. Là se pose le choix: je passe les pegasus ou pas? En fait j’ai déjà décidé; je suis pas là pour gagner (en fait le gagnant du 62 est arrivé au moment où je quittais le ravito du 36!) je suis là pour m’amuser, prendre du plaisir! Et moi mon plaisir c’est de courir pieds nus, ou presque! alors je repars en VFF, en zigzaguant entre les cailloux les pierres, en cueillant les marguerites entre mes orteils!
Ascension du cap Blanc Nez, encore une fois, j’insiste: dans le Pas de Calais c’est pas plat!!
Km 45, la ça devient moins drôle, une descente facile entre la cap et Sangatte, aucune difficulté majeur… juste les abducteurs qui refusent de continuer à fonctionner, les cuisses qui commencent à râler… et surtout très grosse contracture dans les mollets quand j’essaie de plier les orteils.
Je regarde mes orteils dans leurs manches respectives… j’ai l’impression d’avoir 5 chipolatas (ou plutôt fricadelles) au bout des pieds.
A côté de moi un ruban de route, la voiture qui n’est pas loin… aaah j’avoue j’ai abandonné au km 45, au bout de 5H30 de balade.
Quelques conclusions a cette expérience:
– c’est sans aucun doute plus dure de faire un trail en VFF qu’en chaussures de trail… mais c’est tellement plus FUN!
– En 5 heures de course j’ai croisé beaucoup de regards étonnés, et 5 personnes qui ont osé me demandé qu’es ce que c’est que je portais là.
– j’ai pas fini la course, mais j’ai pris du plaisir à courir dans ces paysages avec mes chaussures un peu bizarres et au bout du compte, c’est pour ça que j’étais là!
– à redire course après course, merci à tous les bénévoles qui se lèvent bien avant nous et repartent bien après nous, car sans eux pas de course!
On se retrouve là bas l’année prochaine et j’espère bien vous raconter ce qui se passe après le km 45!