Il est 16h sur ce petit chemin perdu de l’Aveyron vers Séverac l’Eglise. Je suis arcbouté au possible. Ma foulée est courte, rasante. Je lance un petit regard vers le haut. Je ne sais pas si c’est le sommet. J’aperçois encore un virage. La végétation est plus clairsemée et j’imagine que c’est le bout. Le sommet. La bascule. Mais j’imagine seulement…
Je me projette dans la descente. La délivrance. Mais je sais aussi que, peut-être, après le virage, la pente va continuer encore un peu. Encore cent mètres, encore trois cents ? Je n’en sais rien. Je ne connais pas les lieux. Le parcours a changé aussi par rapport à l’an passé.
Mon tee-shirt est trempé. Je m’en sers de serviette rafraîchissante. Un petit bout de tissu pour me mouiller les lèvres.
Je joue avec les ombres. J’essaye d’anticiper sur mes prochaines foulées. Je cherche le passage le moins caillouteux, le moins difficile. Un petit arbuste projette quelques mètres carrés d’ombre, je dévie légèrement de ma trajectoire pour aller chercher cette fraîcheur relative. Peut-être deux ou trois degrés de moins ? Je ne sais plus trop. Mais cela m’aide à avancer en tout cas…
Surtout ne pas marcher. Essayer de garder la cadence. Même si je n’avance plus très vite. Je sais que si je marche, ce sera une première capitulation. Et le soleil n’aura alors plus de pitié pour moi !
Je pense à ces vieilles bande-dessinées de cow-boy qui ont bercé mon enfance et où, en plein désert, de valeureux justiciers croisaient au bord du sentier des squelettes de vaches ou autres bisons. Je pense aussi, plus prosaïquement, que j’ai bien fait d’emmener mon camel-bag finalement !
Je n’ose plus regarder vers en haut désormais. J’ai trop peur que ce chemin n’en finisse jamais. Que les virages se succèdent indéfiniment. Je suis seul. Je cours seul depuis plus d’une heure.
Je serre les dents encore et encore… et j’arrive enfin en haut. La bascule est là. Quelques foulées et débute la descente. Dans ma tête comme un grand bol d’air frais… Enfin !